17 janvier 2015
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07:41
Il y a quelque temps nous avons reçu chez nous pendant trois jours une famille anglaise dont les deux enfants, âgés de dix et sept ans, venaient pour la première fois en France et découvraient Paris.
Chaque matin pour le petit-déjeuner, nous déposions sur la table un grand pot de Nutella (mixture habituellement proscrite de leur consommation), et des croissants frais. La petite fille prenait un couteau, coupait un croissant en deux, le tartinait abondamment avec la pâte susnommée, et le refermait les doigts pleins de miettes. Puis elle croquait dedans à pleines dents avec de longs gloussements de plaisir. Constatant que ses parents ne disaient rien, son petit frère l'imitait aussitôt.
Le troisième jour de ce régime, submergée d'enthousiasme et faisant le bilan de son séjour, elle n'évoqua ni la tour Eiffel ni les Champs-Elysées, mais confia simplement à son père : – Daddy, the French, they have the best breakfast in the world !
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Le fil des jours
16 janvier 2015
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07:19
Mon interlocuteur me raconte l'histoire d'un de ses amis qui s'est lancé dans une entreprise difficile. – Si difficile, me dit-il, qu'il a fini par « jeter les ponts ».
Tant qu'il n'a pas coupé l'éponge...
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Le fil des jours
15 janvier 2015
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07:29
Dans le train. Sur les sièges devant nous, un garçon et une fille parlent fort. Leur conversation roule sur une géographie bien incertaine. – Tu connais l'Arctique ? demande-t-elle. – Non, mais j'aimerais bien y aller. Encore qu'un copain m'a dit qu'il y fait très froid... – Et l'Antarctique ? Là on doit crever de chaud...
Elle a sans doute dit ça par assimilation avec gel et antigel.
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Lu - vu - entendu...
14 janvier 2015
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07:21
La France est un pays où l'on veut être libre. Libre de penser, libre de croire, libre de rire, libre de dire des conneries. Pour ce qui est de rire et de dire des conneries, il y avait Charlie Hebdo. Peu de gens le lisaient, mais il était là.
Ceux qui ont voulu tuer Charlie Hebdo ont blessé l'esprit du pays. Un esprit qui remonte peut-être aux Gaulois, mais à coup sûr au moins à Villon et Rabelais. Montaigne écrit : « J’ai un tel faible pour la liberté que si l'on me défendait l'accès de quelque coin des Indes, j'en vivrais très mal à mon aise ». Charlie Hebdo était ce petit coin des Indes. Un lieu d'irréverence, d'insolence, de dérision, de déconnade. Un lieu, comme son ancêtre Hara-Kiri, souvent bête et méchant. Un lieu que les Français, dans leur immense majorité, ne fréquentaient pas, ou alors très épisodiquement, mais où ils étaient heureux de se dire qu'ils pouvaient aller. Le Je suis Charlie apparu dans les heures qui ont suivi la tuerie de Charlie, c'est comme cela que je l'ai compris.
Les tueurs de la semaine dernière ayant dans le même mouvement assassiné des Juifs, toutes les libertés du pays se sont retrouvées d'un coup bafouées et foulées aux pieds. D'un coup, la liberté de croire et celle de déconner sont apparues une et indivisibles. C'est sans doute un étrange et paradoxal alliage, aux yeux du reste du monde, mais c'est le génie de notre peuple, qui ne s'est pas privé, dimanche, de se lever en masse pour le faire savoir.
(Je finis d'écrire ces mots, et Claudine est déjà partie, d'un bon pas, acheter le Charlie de la semaine.)
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Le fil des jours
13 janvier 2015
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Nous tenons une réunion de notre association Chansons et Mots d'Amou, consacrée à la préparation de la prochaine édition du festival, et la discussion tourne autour du prix des billets, notamment celui du pass, qui permettra d'assister à l'ensemble des manifestations prévues sur les trois jours.
L'une des participantes se fait expliquer tout ce à quoi ce pass donnera accès : les parades, les ateliers, les lectures, les concerts. Elle s'émerveille de cette profusion, et finit par s'enthousiasmer : – C'est génial, ce pass : une fois que vous avez payé, tout est gratuit !
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Le fil des jours
12 janvier 2015
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07:06
Pour la première fois de ma vie, hier, je suis allé manifester.
Au cours de la marche, sur le boulevard Voltaire, nous cotoyons un couple de blacks qui brandissaient deux grands drapeaux tricolores. Claudine engage la conversation. – Il y a longtemps que vous êtes là ? Ils sourient. – Oui. Depuis sept heures du matin. On ne voulait rien manquer. – Sept heures du matin ? Mais il y avait déjà du monde ? – Euh... Non. Nous étions quatre.
C'est ainsi que nous avons fait connaissance avec les pionniers de cet immense défilé. La femme confie un moment son drapeau à Claudine. Elle était discrète, vêtue d'un anorak, la capuche sur la tête, et une écharpe qui lui couvrait le bas du visage. Si l'on regardait bien, on s'apercevait qu'en dessous, elle était voilée.
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Le fil des jours
10 janvier 2015
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07:18
« Ils sont cons, c'est un fait, mais que veux-tu y faire ? (...) Tu parles et tu ne devrais que chanter. CHANTER, comprends-tu ? » Brassens (Lettres à Toussenot)
« Ce qu'on demande aujourd'hui : de la gaieté. Je n'appelle pas gaieté ce qui excite le rire ; mais un certain charme, un air agréable qu'on peut donner à toutes sortes de sujets, même les plus sérieux ». La Fontaine (Préface des Fables)
Gaieté, insolence, élégance, légèreté. Des qualités bien françaises. Autant de claires fontaines dans l'eau desquelles il est bon, par les temps qui courent, de se retremper.
Prochaines représentations de La Fontaine / Brassens :
13 janvier 2015, 20h00
Vingtième Théâtre
7 rue des Platrières 75020 Paris
http://www.vingtiemetheatre.com/reservationstarifs/
16 janvier 2015, 20h30
Espace Albert Camus
1 Rue Maryse Bastié 69500 Bron
http://www.albertcamus-bron.fr/evenement-141-La-Fontaine--Brassens.html
29 janvier 2015, 20h30 (COMPLET)
Le Rabelais Annecy
21 Route de Frangy 74960 Meythet
http://www.rabelais-spectacles.com/infos.html
Qu'on se le dise !
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Affaires publiques
9 janvier 2015
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Le con est partout. Observons-le : on le croise, dans la rue, le métro, au travail, au marché. Bien que la plupart du temps il soit inoffensif, il est parfois dangereux, surtout quand il se promène armé. Il parle (et dit alors des conneries). Il prie (les voies de Dieu sont impénétrables). Il vote (pas comme vous, en général). Il n'aime pas trop qu'on rie, parce qu'il a tendance à penser qu'on se moque de lui. Il a des certitudes, qu'il n'aime pas qu'on conteste. Si on croise sa route un jour où il est énervé, (ou ivre, ou en colère) on peut malheureusement se retrouver à un con de la mort.
Il va de soi que ceux qui tentent de contenir la bêtise sont plus exposés aux cons que les autres, de même que les médecins qui essayent de juguler une épidémie sont plus exposés aux virus que ceux qui en restent à distance. Alors, si un con virulent les chope, hou la la, pan pan !... Ciao. Ce sont les risques du métier.
La mode est en ce moment au con barbu et fanatique, un excellent modèle, mais attention : il y a des cons de toutes tailles, de toutes couleurs, de tous âges, de toutes croyances, de tous bords. Comment alors le reconnaître ? C'est simple : le con croit qu'il peut éradiquer les cons.
D'ailleurs moi-même, assez souvent, j'ai des rêves de con.
© Xavier Gorce / Le Monde
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Le fil des jours
8 janvier 2015
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Hommage à Cabu
Etrange correspondance. Mon article d'hier montrait un homme « à un pet de la mort ». Un pet, une balle, un trou, un rien, un con. On vit tous à un con (ou deux) de la mort.
© David Pope
Voyez Cabu, Wolinski, Charb, Tignous, Honoré, qui pratiquaient en virtuoses deux qualités bien françaises : l'irrévérence et l'insolence. Ça leur valait d'être menacés depuis plusieurs années. Ils n'ont pas pour autant renoncé à leur art, ni à leur liberté. Qu'on le veuille ou non, cette liberté était la nôtre. Ils l'ont défendue. Ils sont morts en héros.
(Cette idée de mourir en héros, je pense que ça les aurait fait marrer.)
"He drew first" : jeu de mots. To draw : dégainer ou dessiner. "Il a dégainé / dessiné le premier".
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Le fil des jours
7 janvier 2015
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J'ai trouvé cette photo par hasard sur le web. Un inconnu plein d'humour lui a attribué cette légende : « A fart away from death (à un pet de la mort) ».
La nature, heureusement, est bien faite : on serre furieusement les fesses, dans cette vertigineuse position.
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Lu - vu - entendu...